Homélie du Père Aimilianos (suite)

« Pour pratiquer cette prière, il faut , selon les pères, posséder et cultiver avant tout un élément : de même qu’il faut être attentifs à notre santé, de même, pour s’adonner à l’oraison, il nous faut être attentifs à la santé de notre âme. C’est pourquoi les saints pères disent que pour pratiquer la prière, il faut être joyeux »

Nous avons depuis longtemps insisté dans nos cours d’icônes sur cette dimension essentielle de l’être : pour être proche de Dieu il faut avoir un cœur joyeux. Ce-ci n’est pas sans nous rappeler les paroles du père Alexandre Schmemann dans ses écrits sur la joie. Il s’interroge sur le fait que de nombreuses personnes qui se disent pieuses sont tristes : cela semble être une pure contradiction, puisque la joie est un signe de la présence de Dieu. Il ne s’agit pas de la joie artificielle ou superficielle qui cache une profonde tristesse, mais de la joie essentielle. Cette joie n’est pas facile à trouver chez les êtres et en effet, bien souvent, les personnes dîtes pratiquantes sont tristes. Ce-ci peut nous amener à nous interroger sur le sens de la pratique liturgique. Nous pouvons trouver un début de réponse en constatant que finalement nous nous nourrissons de cette joie qui nous fait vivre. Elle nous transforme et nous aide à exister mais elle ne vient pas de nous. C’est pourquoi de nombreuses personnes tristes viennent chercher cette joie dans l’église.

« Si tu ne surmontes pas ton affliction, la prière sera alors pour toi dangereuse. Tu peux l’essayer, mais seulement si elle te donne de la joie, car une prière n’est véritable que si elle nous remplit d’allégresse ».

Nous nous trouvons face au mystère de cette activité. En effet, il n’est pas possible de continuer à diriger sa prière, à contrôler ses pensées car cela signifierait que la prière vient de nous. Nous devons être habité par Une Présence qui prend racine dans notre corps et qui s’appelle Dieu. C’est Elle qui agit dans notre cœur et qui le rend joyeux. Si nous maîtrisons notre prière nous ne sommes plus dans l’abandon et la prière ne peux plus venir de Dieu. C’est pourquoi la tristesse nous envahit. Il est totalement insensé de prier pour obtenir un résultat pour telle ou telle chose. Par contre il faut se livrer à l’Amour de Dieu en portant dans notre cœur nos désirs et nos souhaits. Il en va de même dans l’apprentissage de la peinture des icônes. Nous devons abandonner notre propre volonté si nous voulons grandir. Il faut apprendre à se laisser guider si nous voulons progresser et non à imposer ses désirs. Ce-ci est sûrement la chose la plus difficile.

« Quelle belle description de Saint Sabas de Vatopédi donne ainsi son biographe, saint Philothée : »dans les rencontres, il était plein de gaieté, et son apparence était aimable et pleine de grâce«  ! Un père ascétique note lui aussi : »la prière est le produit de la joie et de l’action de grâces.« Veux-tu savoir si ta prière est véritable ? Regarde si elle produit, si elle te donne la joie comme fruit et si elle met ton âme en fête. Le même père ajoute : »lorsque quelqu’un se met à prier, s’il voit naître en lui une joie qui dépasse toute joie, qu’il dise alors : « Gloire à Dieu, j’ai prié ! » Puisque la prière est communion avec Dieu, elle donne toujours la joie et, si elle n’est pas productrice de joie, cela signifie alors que nous avons en nous quelque chose d’autre et que notre prière n’est pas authentique."

(à suivre)

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